Les 22 et 24 mars dernier, nous avons, Matcha latte, Mocha et moi-même, Chai latte, assisté à deux conférences organisées par les bibliothèques de la Ville de Paris : l’une sur la question des jeunes coréens et la seconde sur les représentations de la femme coréenne. Toutes deux étaient présentées par le professeur Jean-Claude de Crescenzo, ce qui a permis un dialogue entre le public et les invités coréens. Ces conférences se présentaient d’avantage comme des débats sur des questions culturelles et sociétales propres à la Corée du Sud ce qui a permis au public français (et aussi coréens !) de mieux comprendre la société coréenne et les problèmes auxquels les jeunes et les femmes peuvent faire face actuellement.
Avec beaucoup de retard, nous avons décidé de vous rapporter de ce qui est ressorti de ces débats (cela serait trop long de retranscrire toute la conférence) en commençant par celui sur les jeunes coréens. Nous parlerons de celui sur la vision des femmes coréennes dans un second article.
Rencontre-Débat : Qui sont les jeunes coréens ?
Lieu : Biblithèque Buffon
Invités : Kim Young-Ha et Kim Ae-Ran
Le professeur de Crescenzo nous a rappelé l’histoire tourmentée de la Corée du Sud en signe d’introduction. En effet, la Corée du Sud a connu une dictature dans les années 1960 à 1990 avant la mise en place de la démocratie en 1991 puis elle a connu une crise économique en 1997. Le pays est devenu vite riche grâce au constant travail des coréens ce qui créa, et crée encore, des problèmes au sein des familles coréennes. Le gouvernement a placé, et place encore, un investissement majeur dans l’éducation des jeunes, tout comme les familles qui sont prêtes à s’endetter pour apporter une « bonne » éducation à leurs enfants. Mais un écart se creuse entre les anciennes générations et les nouvelles. Les jeunes sont « sans mémoires du passé », nés dans une société d’abondance et de développement technologique, ils ne se reconnaissent plus dans ce qu’a vécu la génération précédente. Cette séparation est visible aussi en Littérature : une séparation existe entre une littérature réaliste des années de souffrance et une littérature post-eighties/nineties avec des auteurs majeurs se trouvant dans le plein développement de la Corée.
Les premières questions sont posées à Kim Young-Ha, un pionnier de la littérature coréenne en France. Il signe un nouveau type de roman en Corée puisqu’il y décrit une Corée avec ses faiblesses. Il s’exprime avec liberté et s’intéressent notamment aux jeunes coréens non scolarisés en leur donnant la parole. Ces jeunes sont souvent laissés pour compte en Corée et ne sont pas soutenus par le Gouvernement et les conglomérats. « Sans morales » et « sans valeurs », leurs vies ne sont pas roses et certaines scènes du roman de Kim Young-Ha, J’entends ta voix, choquent. Il y décrit la descente aux enfers de ces jeunes qui semble sans fin. L’auteur a interviewé certains d’entre eux, et il n’existe aucune vision de changement dans leur esprit. Et, globalement, aucun projet politique n’est mis en place pour changer cela. Il n’y a pas de revendications, contrairement à la génération précédente, car l’ennemi, et en particulier ce qui est mis en cause, reste flou. En Corée, être sans emploi est une honte, les gens se cachent et restent seuls, d’où l’absence de communauté et d’entraide, y compris entre personnes/jeunes sans emploi ou sans éducation.
L’Université est importante en Corée. Elle est contrôlée par les conglomérats qui créent une compétition pour ne garder que les meilleurs et créent une certaine culpabilité chez les personnes désapprouvant ce système. Les coréens ne se révoltent pas aussi par peur ne de pas être recrutés ensuite. Il existe aussi une pression familiale puisque les parents investissent beaucoup dans l’éducation des enfants. Ils attendent beaucoup des enfants, qui sont le centre de la famille.
Un autre point à mettre en avant : la « promesse de consommation » comme le dit bien l’auteur. Bien qu’il n’y ait pas beaucoup d’opportunité de travail en Corée, les coréens peuvent avoir le dernier produit à la mode. Les jeunes se considèrent comme consommateurs et ainsi se considèrent puissants. Car dans une société de consommation, « qu’est-ce qu’il y a en-dehors de la consommation ? ». Les jeunes non-scolarisés ne se considèrent pas comme consommateurs : ils ne consomment pas et font tout pour.
Le débat se poursuit ensuite avec Kim Ae-Ran, surnommée la « jeune prodige ». Elle écrit ses romans et nouvelles en prenant des jeunes en tant que narrateurs car elle estime qu’ils sont plus sensibles. A travers leurs yeux, elle décrit les personnes de sa génération et leur façon de penser. Contrairement à beaucoup, elle a changé son regard sur sa propre génération et aime casser les préjugés.
En revenant sur le sujet des jeunes, elle pense que la nouvelle génération est dans une situation plus difficile que la sienne. En coréen, les mots « Printemps Bleu » décrit la jeunesse. Pour elle, cela représente les bleus qu’on se fait quand on se cogne et représente ainsi la jeunesse d’aujourd’hui (qui se heurte à un mur invisible). Les jeunes n’ont plus droit à l’erreur, contrairement à la génération précédente qui ont « reçu des médailles » suite aux révoltes historiques et considèrent les jeunes comme faibles et fainéants. L’auteure met en avant une peur et un mépris présents chez les jeunes : celle de dégringoler de l’échelle sociale.
Enfin, un parallèle est fait entre alphabétisation et le taux de suicide. En effet, les parents ont consacré leur vie aux enfants et ne prépare pas de retraite puisque souvent ce sont les enfants qui s’occupent des parents. Or, les enfants ne peuvent plus entretenir leurs parents du fait de la difficulté de trouver du travail. Se considérant comme une charge, les parents se suicident. Le taux de suicide est en effet plus important chez les seniors.
Pour finir, les auteurs mettaient en avant que le cœur des problèmes était l’Education, et qu’il faut que le gouvernement propose une alternative. La Littérature peut être un moyen de faire prendre conscience de l’existence des problèmes que subissent les jeunes d’aujourd’hui à travers les émotions et les sentiments. Malheureusement, cela peut donner à réfléchir mais souvent les gens ne se bougent pas.
Bilan : Ce débat n’a pas montré une vision très optimiste de la jeunesse coréenne. Subissant la pression sociale, ils ont de plus en plus de mal à complaire aux attentes de leur famille et de la société. Certains parallèles peuvent être fait avec la France où les jeunes ont également de plus en plus de mal à trouver un travail (en tout cas c’est ce que je ressens et en parlant avec ma famille et mes amis cela se ressent également). Mais contrairement à la Corée nous avons moins cette pression sociale, au vu de notre culture individualiste. Mais, avec la mondialisation, cela semble changer
Etrangement (ou pas), j’ai pensé au drama « Misaeng » (année) avec Siwan (ZE:A), Kang So Ra (Sunny) et Lee Seong Min (The Attorney)
Et vous, que pensez-vous de la situation des jeunes en Corée ?
Intervenants: